Voici l'affiche publicitaire que je vous ai donné en cours pour que vous fassiez l'exercice pour lundi prochain. Je rappelle l'exercice : vous avez une affiche relevant d'une campagne publicitaire de Synabio, le syndicat défendant les intérêts des entreprises privées qui adhérent
au label commercial AB (agriculture biologique). Pour rappel, ce label n'est pas le seul label de qualité existant, ni le seul se voulant écologique. Il existe en France notamment le label HVE (Haute Valeur Environnementale), qui a été créé par l’État français après le Grenelle de l'environnement,
et qui fixe des critères objectifs très stricts pour que les
agriculteurs puissent l'obtenir : ces critères se basent, dans le label
HVE, sur les effets sur l'environnement, un agriculteur devant
faire recours, pour l'obtenir, aux pratiques et aux traitements les plus
écologiques possibles (moins de pollution possible, conservation du
sol, respect de la biodiversité, etc). Le label AB, au contraire,
interdit tout traitement et technique "de synthèse" ou non
traditionnelle, même quand ces traitements et techniques sont meilleurs pour l'environnement dans leurs effets.
Cet interdit est rappelé dans l'affiche publicitaire en question, qui
souligne l'interdiction des pesticides "de synthèse". Le disciplinaire
de l'agriculture biologique présuppose que les substances synthétisées
par l'homme sont toujours plus dangereuses que les substances
synthétisées en nature. Cela va à l'encontre des bases mêmes de la
science chimique : la même molécule, synthétisée par l'homme ou par un
organisme ou un phénomène naturels, reste identique. Non seulement : la
plupart des substances synthétisées par l'homme existent déjà en nature,
et les réactions chimiques obtenues par l'homme ne font souvent que
reproduire des réactions chimiques de synthèse existant en nature. Ainsi
(comme nous l'avons vu en cours, par exemple, avec les composants
chimiques naturels d'un fruit comme la fraise) une substance naturelle
aura l'air très dangereuse et "contre-nature" du simple fait de
l'appeler par son nom "vrai" scientifique (chimique), ou par son code
européen d'additif (lettre E suivi d'un chiffre). Rappel : il n'y a pas
des "substances chimiques" ou des substances "non chimiques". La base
même de la chimie qu'on devrait apprendre dès les premières années
d'école (et qui remonte à Lavoisier, père de la chimie moderne) est que tout est chimique.
Dans l'affiche en question justement, les entreprises qui ont payé la campagne publicitaire demandent d'apprendre par cœur une liste de substances qui seraient (on comprend) dangereuses et absentes des produits Bio. De fait la liste est longue et presque illisible, et surtout composée pour la plupart de substances aux noms chimiques
relativement compliqués : le lecteur ne pourra jamais l'apprendre par cœur, et on se doute même qu'il ne la lira même pas, ni en entier ni en partie.
Pourtant, si on lit vraiment la liste, on découvre des surprises : il y a bel et bien des substances "naturelles".
Voire, il y a beaucoup de substances naturelles, qui non seulement ne
sont pas forcément dangereuses, mais qui sont présentes dans beaucoup de
produits et d'aliments naturels (et Bio), et qui souvent sont
importantes voire fondamentales pour la santé et pour l'alimentation
humaine : sels, vitamines, fibres, acides aminés... À vous de les trouver.
BUT
DE L'EXERCICE : trouver dans la liste au moins 15 substances naturelles
importantes pour l'homme. Faites-en la liste, et
soulignez-les/marquez-les sur l'affiche imprimée. Si elles sont dans la
liste sous leur nom chimique, dites aussi quel est leur nom courant. Si
vous en trouvez plus de 15 ce sera bien sûr apprécié.
Certaines
substances sont présentes avec leur nom courant, d'autres, pourtant
familières, se cachent derrière un inquiétant nom chimique. De fait, les
auteurs de la publicité ont recopié aveuglement la liste des additifs
permis dans l'Union européenne, sans se soucier de ce que ces additifs
sont vraiment. Je rappelle par ailleurs que si un additif est accepté
par l'UE (plus précisément par l'agence européenne EFSA qui s'occupe de
la sécurité des aliments, en suivant des règles très strictes), c'est
qu'on a prouvé qu'il n'est pas dangereux pour les consommateurs dans les
usages et les doses en question...
Cette affiche est hélas un exemple d'école de publicité trompeuse et antiscientifique :
1)
on laisse croire que les substances en questions sont dangereuses,
alors que ce n'est pas forcément le cas (et sûrement pas parce qu'elles
sont "de synthèse").
2) on laisse croire que ces substances ne seraient pas "naturelles", alors que cela est également faux,
3)
Enfin, on laisse croire que ces substances seraient absentes des
produits Bio, alors que cela est faux aussi. En bonne partie les
substances de la liste sont présentes dans les produits Bio, soit
naturellement, soit comme additifs (oui, le Bio permet bien sûr, dans
les produits Bio transformés, l'usage d'additifs chimiques, s'ils ne
sont pas synthétisés par l'homme). De fait, la même substance peut être
fait passer comme dangereuse, ou pas, selon que le produit a, ou non, le
label AB.